L’abandon : faites en un acte positif

Date : Mardi 11 mai 2010 @ 08:30:56 :: Sujet : La gestion de la course

Les plus belles victoires, dit-on, sont celles que l’on accomplit sur soi. Une évidence quand on atteint son objectif, mais lorsqu’on échoue… Et si l’abandon représentait d’abord une victoire sur son ego ! À méditer.





Abandon ! Capitulation, renoncement. Quel que soit le mot employé, il ne fait pas vibrer. L’acte d’abandon n’est pas chargé d’ondes positives. Dans une culture du sport où les valeurs de volonté, de dépassement de soi, voire de transcendance, sont valorisées, où il faut aller chercher au fond de soi le courage de continuer, la force de tenir, celui qui abandonne est parfois mal vu. De ce fait, là où des douleurs imposeraient de s’arrêter, le coureur continue. L’erreur est de confondre sa propre réalité de coureur avec son idéal, l’athlète de haut niveau. D’abord parce que ce dernier a normalement les moyens physiques de ses ambitions ; ensuite parce que l’abandon pourra être vécu par lui comme un moment possible de son parcours. S’il constate en course qu’il n’est pas dans les temps prévus, la décision d’arrêter peut apparaître stratégique pour ne pas se fatiguer et rebondir plus facilement.

Tous les coureurs ne sont évidemment pas soumis aux mêmes lois. Mais qui sont-ils ? Il y a tout d’abord ceux pour qui courir doit être du plaisir. Ils acceptent bien volontiers d’avoir un peu mal aux jambes au bout de 18 km sur un semi mais s’il faut courir avec la douleur lancinante d’une ampoule ou un mal au cœur tenace, pas question ! Leur objectif est de courir avec de bonnes sensations et non pas de continuer, semi-agonisants, cherchant le meilleur endroit pour restituer leur petit déjeuner. Ils préfèrent s’arrêter, pas question pour eux de se dégoûter d’une aussi belle épreuve. La prochaine fois, ils gèreront mieux leur repas ou choisiront mieux leurs chaussettes ! Ces coureurs-là, c’est à peu près certain, sauront s’arrêter sur une douleur anormale.

Mais il y a une autre catégorie de coureurs, ceux qui courent pour se dépasser, progresser, réaliser un temps, même si pour cela ils doivent souffrir sur la distance. Dans cette catégorie, on distingue encore ceux qui sauront écouter les signaux d’alerte de leur corps avant d’arrêter et ceux qui, poussés par l’envie d’arriver, minimiseront les conséquences prévisibles.

Mais pourquoi ne s’arrêtent-ils pas ?

Les raisons qui empêchent un coureur de s’arrêter, alors qu’apparemment il prend des risques pour sa santé, sont diverses. C’est souvent l’image de soi, le regard des autres, le sens de l’engagement, une certaine inconscience par rapport au risque ou tout simplement une méconnaissance des signaux d’alerte. Il y a aussi des mécanismes moins visibles mais qui déterminent nos comportements. Nous avons tous une idée de ce que doit être notre comportement dans la vie et donc sur une course. Nous avons des convictions, voire des croyances, sur ce qu’il faut faire et ne pas faire, ce qui est bien, ce qui est mal.

Ces convictions ou croyances, souvent construites dans l’enfance, transmises par nos parents, peuvent être positives ou négatives, nous porter ou nous freiner.

Par exemple, une croyance positive en nos capacités détermine en grande partie ce que nous réalisons. Si je me sens capable de réussir, je vais mettre tout en œuvre pour réussir. De la même façon, par un effet pervers, lorsque nous croyons que nos capacités sont limitées, nous tendons à tout faire pour confirmer et renforcer cette conviction. Il y a aussi les convictions sur ce qui doit se faire ou pas. Certains ont des difficultés à abandonner parce qu’ils ont reçu dans l’enfance, comme message : « sois fort » ou « si on fait des efforts, on doit y arriver » ou encore « si on commence quelque chose on va jusqu’au bout ».

Alors certains s’accrochent à tout prix, d’autres faiblissent en cours de route. La fatigue, le mental qui baisse, des coureurs qui vous doublent à droite, à gauche, le ras le bol, la pluie, le vent. Même le coureur motivé peut avoir un coup de pompe et une baisse de moral. Dans cette configuration, l’abandon n’est pas un acte souhaitable car il serait synonyme d’échec pour cause de non combativité. Face à cette situation, il faut alors trouver les ressources pour continuer. Comment se dynamiser ? Comment aller de l’avant et terminer ces foutus 12 derniers kilomètres ? Il y a des techniques, des stratégies qui aident à booster son mental, à atteindre son objectif !

Abandonner peut aussi devenir un acte responsable et positif,
garant d’une future réussite

Ne nions pas le fait que l’acte d’abandon ne fait pas plaisir. On est déçu ; mais vivre la déception est une chose, l’entretenir en est une autre. Le corps n’est pas infaillible et quand des signaux d’alerte sont là, il est préférable de les écouter. Il importe alors d’être constructif et de savoir tirer les leçons de son renoncement. Pourquoi ai-je dû abandonner ? Quelles erreurs ai-je commises ? Comment corriger les « moins » de ma préparation et de ma course pour ne pas les reproduire. Ainsi à chaque course, vous construisez votre progression.
L’abandon par manque de « jus », de combativité peut apparaître comme plus difficile à gérer a posteriori. Le risque : la spirale de l’abandon ! Elle est rare, mais elle existe, l’abandon s’inscrivant dans un processus de répétition. À cela deux raisons majeures. L’obstination d’abord ; le coureur veut à tout prix atteindre son objectif (même s’il est trop haut pour lui), il est dans le « trop », trop d’efforts, trop d’entraînement, trop de volonté. En fait, il ne prend pas le temps de récupérer ; les mêmes causes produisant les mêmes effets, il est à nouveau contraint d’abandonner. Le mental enfin ; il arrive que des coureurs vivent l’abandon comme un véritable échec, une blessure quasi narcissique. Certains se mettent à douter d’eux, ils n’ont plus confiance en leur capacité à tenir la distance, à s’accrocher. Aux moments difficiles, un peu comme un syndrome de répétition, ils vont éprouver les mêmes difficultés, revivre les mêmes (mauvaises) sensations et finissent par abandonner. Le plus intéressant dans ce cas, reste le processus mental par lequel le coureur se met tout seul en situation d’échec. Comment ? En développant avant la course des scénarios d’abandon. Il a peur d’abandonner et se voit abandonner ; les pensées menant à ce résultat… Le vrai problème dans ce cas, c’est qu’il arrive sur la ligne de départ avec une peur d’abandonner plus forte que l’envie de réussir.

Cela dit, n’ayons pas peur de dire que la plupart des coureurs qui abandonnent sur une course arrivent souvent plus forts dans leur corps et dans leur tête sur la suivante.

Avoir un « bon mental » est essentiel pour le coureur


Essentiel parce que, contrairement à d’autres compétiteurs, il est seul face à la performance à accomplir, face à la distance et au chrono.
De même que l’on peut améliorer sa condition physique et sa technique, il est possible de travailler son mental, d’apprendre à mobiliser toutes ses ressources pour atteindre son objectif. Avec la prise de conscience de ses processus mentaux et quelques techniques bien maîtrisées, il est possible d’acquérir cette capacité à « tenir » la distance. Ce n’est pas toujours facile, mais quel plaisir, quel bonheur ensuite, quand on passe la ligne d’arrivée.


Source: www.jogginginternational.net







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