Il faisait juste partie de ma progression très lente depuis 3 ans et demi, avec quelques seuils cette année de mes 50 ans, jusqu’aux 50 km envisagés en fin d’année...

La plus longue distance réalisée pour moi était de 15 km, en entraînement il y a quelques semaines, avec application de ma stratégie rando/course, adaptée à mes possibilités… et que je devais aussi appliquer à ce premier semi.

Avis de tempête sur le Var et les Alpes Maritimes ce we…

La nuit de samedi a été en effet marquée par de très fortes pluies, je ne dors presque pas, de plus en plus inquiète… et déçue de cette malchance… la Côte d’Azur fin avril… promettait un beau temps de printemps habituellement…

Au petit matin, la pluie est toujours aussi abondante, le ciel très bas et noir de nuages méchants…

Soleia dormait chez moi ce soir-là, car elle additionnait ce we 3 courses à 20 mn seulement de Fréjus, donc cela lui faisait moins de route. Elle a tout fait pour me rassurer ces derniers temps…

Mais ce matin de dimanche, je lui dis qu’il n’est pas raisonnable de faire ce semi dans de telles conditions… Ma motivation s’est envolée très loin…

Mais pas la sienne…

Nous voilà donc parties sur Nice, la mer est déchaînée (je souhaite même un mini raz de marée sur la Promenade des Anglais…), la pluie est battante, l’air est saturé d’humidité froide… Bienvenue dans le sud-est !!!



Un double café (presque 8 euros... ) nous redonne un peu (oh si peu !!!...) de chaleur, nous ne retrouvons pas Aeolis, nous allons directement tout au fond du peloton de 8 000 coureurs…

Soleia porte ma nouvelle ceinture à double bidon, pour m’assurer une bonne réserve de boisson énergétique et surtout bien minéralisée… mais plus d’1 kg en plus pour elle… merci ma puce… que ne ferais-tu pas pour moi hein …

La pluie est devenue fine, pas de vent, c’est déjà mieux… La confiance revient un peu… et puis c’est le départ…

Je n’ai qu’une obsession : je veux ma 1ère médaille… je la veux… Elle est pour moi un témoin énorme de mes combats depuis 12 ans… Je la veux…

Seule soleia peut comprendre à cet instant la puissance intime de cette volonté et les valeurs qui en font un tel enjeu…

Je me sens bien, le premier 10 km se fait dans le Nice touristique, à l’Est de la ville, vers le vieux port et en intérieur… Je vois bien que l’avenue Thiers, très longue, monte vraiment, mais je ne vois que le magnifique spectacle de 8 000 coureurs envahissant Nice totalement fermée à la circulation…



Soleia me ralentit comme nous l’avions prévu, ça monte, beaucoup pour moi, mais je ne réalise pas, car je me sens bien…

Ce fut ma 1ère erreur…

On revient sur la Promenade, et on bifurque vers l’Est… on « remonte » donc vers le vieux port… là aussi, une méchante montée… je la marche en partie, et puis on continue… Je bois, mais sans doute pas suffisamment déjà… A l’approche du 1er ravitaillement, gros bug dans l’organisation : les tables sont à gauche mais là nous croisons le retour des 10 km et du semi, beaucoup de monde, aucun respect des plots séparant l’aller et le retour, et…. aucun respect de certains pour nous les derniers… on est bousculées… je me prends une épaule juste sur ma mauvaise tendinite qui a mis 7 mois à s’atténuer… cela me déstabilise beaucoup et je ne comprends pas un tel comportement entre coureurs…

Soleia comprend, elle me dit d’oublier et de me reconcentrer…

Après la boucle sur le port, nous gravissons à nouveau la même montée mais dans l’autre sens, cela commence à devenir très dur, je ne peux plus suivre la régularité rando – course qu’on avait prévue…

Nous redescendons alors vers la mi-parcours, c’est la fin du 10 km, nous encourageons quelques coureuses à bout de leurs efforts… Je me serais bien arrêtée aussi…

1 h 18mn… je calcule rapidement… c’est simple… il est pas mal du tout ce 10 km… puisque le temps prévu pour ce semi était de 2 h 45… Je retrouve ma confiance… mais…

Mais très vite je perds toute énergie, je n’arrive plus à courir, je suis de plus en plus tenaillée par des douleurs très intenses dans les épaules, la nuque, j’ai un étau autour de mon torse…

Les sanglots m’envahissent, mais je ne veux pas… non, je ne veux pas… la médaille…

Je sais ce qui reste : les 10 km sont exactement ceux de la Prom’Classic, un aller-retour sur toute la Promenade des Anglais, avec la boucle retour au niveau de l’aéroport, le 15e km… Il est tellement loin cet aéroport, là-bas, à l’horizon, les avions qui décollent tellement petits…

C’est un découragement dévastateur…



Je cours quelques centaines de mètres seulement et puis je marche, entre ces si petites portions courues… Je vois bien que ma vitesse moyenne descend de plus en plus… je sais que si elle descend sous les 7 km/h, je serai au-delà de la barrière horaire…

Un coureur qui termine, dans l’autre sens, a le geste spontané de me donner une de ses éponges encore pleine d’eau… merci l’ami…

Soleia en attrape d’autres un peu plus tard et me rafraîchit les épaules… Le soleil revient, l’évaporation des trombes d’eau tombées avant provoque un vrai brouillard tropical qui s’élève de l’asphalte… C’est étouffant… De l’autre côté, tout le monde souffre aussi…

Qu’elle est longue cette Promenade… les avions grossissent peu à peu, mais encore tellement loin…

Enfin la boucle retour… le 15e km… La voiture balai se rapproche alors… elle était jusque là relativement loin, suivant le dernier coureur… qui a fini par abandonner… donc elle était pour moi désormais…

Au 16,5 km, la voiture se met à hauteur de soleia, discussion… je veux la médaille… je ne veux pas être disqualifiée… c’est trop dur là…

Alors… alors c’est une proposition incroyable qui m’est faite : je ne suis pas blessée, je suis déterminée, c’est mon 1er semi, je suis juste… très fatiguée…

« Montez dans la voiture, je vous emmène jusqu’au 20e, et vous terminez le dernier km en courant… et vous aurez votre médaille... »

Ma reconnaissance pour cet homme n’a pas d’égale…

Dans la voiture, 2 coureuses blessées, le coureur qui a abandonné… et bientôt deux autres coureurs « ramassés » comme moi avec la même proposition…

Soleia refuse de monter… elle prend son allure de croisière pour terminer en courant et dans les temps… La voiture balai a compris qui est cette petite bonne-femme… reste un moment calée derrière elle comme le veut le règlement, et puis… la dépasse pour enlever chaque panneau kilométrique tout en l’attendant à peine à chaque fois…

Au 20e… 3 coureurs un peu reposés descendent vaillamment de la voiture… l’un d’eux décide d’attendre avec moi soleia pour terminer ensemble… c’est son 1er semi-marathon depuis 10 ans d’interruption…



Et nous voilà repartis tous les 3… bientôt nous nous prenons les mains, moi entre eux, le coureur me serre fort, il me fait ralentir un peu, l’arche blanche grossit vite, on est applaudis avec beaucoup de chaleur… et le tapis bleu est sous nos foulées…

Nous franchissons tous les 3 la ligne ensemble…

2h50’30’’… pour 17,5 km réellement pour moi…

Je reçois ma médaille… avec une émotion profonde… pour 17,5 km réellement pour moi…

Mais je la prends… j’ai tout donné…. C’était mon 1er « semi », le prochain je ferai les 21…

Merci Monsieur de l’organisation… Merci Clive, pour ce dernier km…

Surtout… merci soleia…

Message édité par : Petitrenardbleu / 30-04-2012 19:41